samedi 24 avril 2010

Takeshi Kitano : Asakusa Kid

Paru en 1988 alors que Takeshi Kitano n’avait pas encore tourné son premier film mais était déjà un humoriste très populaire, Asakusa Kid est une autobiographie ou plus exactement le récit véridique et cocasse d’un apprentissage.

L’histoire commence à Tokyo en 1973. Takeshi Kitano s’ennuie sur les bancs de l’université et décide de tout plaquer pour devenir un comique. Il part donc à Asakusa, le quartier chaud de la capitale nippone où se trouve grand nombre de cabarets, pour décrocher un contrat. Évidemment on lui rie au nez. Comique, c’est un métier, cela ne s’improvise pas, qu’il revienne quand il aura appris. Voilà ce qu’on lui répète à chaque fois. Mais, coup de chance, sa dernière tentative est fructueuse. Le Français, boite de strip-tease où des humoristes ringards présentent des sketchs éculés entre deux numéros d’effeuillage, recherche… un garçon d’ascenseur !

C’est dans l’ascenseur qui mène à la salle de spectacle du Français que Kitano rencontre le directeur de l’établissement qui est aussi son comique principal, le grand maître de l’humour Senzaburo Fukami. Le maître, un homme solitaire et désabusé, le prend sous son aile et lui apprend le métier. Grand prince, il l’appelle Take ou plus souvent P’tit con et lui permet de dormir dans une loge du Français avant de lui dégoter un studio de 5 m².

Puis un jour, un comique doit s’absenter et Takeski monte sur les planches, pour la première fois, dans un petit rôle de travestis. Un moment savoureux qui lui plait énormément. Et quelque temps plus tard, une place de comique se libère et il peut enfin jouer tous les soirs les sketchs graveleux du maître, dont les deux plus célèbres sont retranscrits à la fin du livre : « Le Paralysé » et « Le Marchand ambulant ». Il perfectionne son art au Français jusqu’à ce qu’il se rende compte qu’il est temps de passer à autre chose s’il ne veut pas y finir sa carrière. Il part alors tenter sa chance ailleurs et y parviendra après quelques années de vache maigre alors que son maître périra dans un incendie.

Asakusa Kid a beau être autobiographique, on échappe à tout ce qui rend les autobiographies d’acteurs exaspérantes : le récit des origines, les souvenirs d’enfance, les émois amoureux ou encore les portraits flatteurs des confrères. Ce livre est écrit comme un roman d’apprentissage et possède une grande valeur historique puisqu’il s’agit d’un formidable témoignage sur le Asakusa du début des années 70 et ses cabarets. On y découvre la vie de ses comiques, souvent ratés, de ses strip-teaseuses au grand cœur, de ses clochards roublards et bien sûr de ses inévitables yakusas. La vie d’un petit quartier populaire où les petites gens se retrouvaient dans les troquets pour des beuveries et des gueuletons souvent minables et où les amitiés et les disputes étaient toujours cocasses.

Asakusa Kid, Takeshi Kitano, Denoël, 1999 (1988 pour l’édition originale), 240 p.

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